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10 décembre 2018 1 10 /12 /décembre /2018 23:20

Qui n’éprouve pas de l’émotion et de la sympathie pour tous ces gilets jaunes qui disent leurs difficultés à boucler leurs fins de mois, leur sentiment de déclassement et d’exclusion, leur frustration face à une classe politique technocratique qui regarde par dessus les frontières plutôt qu’au cœur du pays en jonglant avec les statistiques et la novlangue de bois macro[n]-économico-écologique ? Après le dégagisme de 2017 qui a mis dos à dos la gauche socialiste et la droite républicaine, l’impatience du peuple saute maintenant à la gorge de ces marcheurs si peu expérimentés et déjà haïs comme une vieille branche politique. Le jeune premier mis sur le trône, il y a dix-huit mois, comme le général Bonaparte après l’exécution de tous les cadres d’ancien régime, est à son tour promis à la guillotine. Emballement digne de 1794, obsolescence programmée accélérée ? Les sans-culottes, mais avec gilets, montent à la Bastille, rejouent la Commune de Paris et célèbrent le cinquantenaire de mai 68, le pavé à la main. Chauffés à blanc par les réseaux sociaux, ces laissés-pour-compte ont d’abord décidé de squatter les ronds-points (sans toujours réaliser combien ces infrastructures florissantes ont représenté un symbole de la gabegie financière) puis ils sont venus dans la capitale pour dire aux franciliens et au pouvoir leur exaspération. - « Vous voyez on existe, vous ne nous parquerez pas dans nos provinces ou dans votre champ de Mars ! »

L’empathie est de rigueur quand on entend des retraités, des mères célibataires, des ouvriers, des employés crier leur détresse. Il faudrait être un sacré égoïste pour ne pas répondre favorablement à tous les sondages d’opinion qui dopent la résistance de ces anonymes trépignant dans le froid à la lumière des feux improvisés. Mais que faire après l’émotion ? Les médias, sevrés de menaces terroristes, alimentent ce buzz permanent en donnant la parole à qui veut la prendre, sans aucun recul ni analyse. Et les gibiers politiques d’hier sonnent l’hallali contre le dernier chasseur avec une cruauté et une irresponsabilité frénétique : - « Les aristocrates à la lanterne ! Les étrangers à la mer ! Faisons tourner la planche à billets aussi fort que la crécelle tonitruante de la démagogie ». Les responsables politiques de ces trente dernières années co-responsables, sinon plus que le jeune locataire de l’Elysée, ne sont pas les derniers à jouer les yakafaukon : augmenter les salaires, supprimer toutes les taxes, rétablir l’ISF, dissoudre l’assemblée, le sénat, renvoyer le président. En attendant ces lendemains qui chantent, Paris subit chaque samedi des vagues jaunes qui ressemblent à un tsunami hebdomadaire sans aucune organisation ni cohérence. Ce n’est plus Zazie dans le métro, c’est la zizanie dans la métropole, l’anarchie dans les rues, le chaos dans la ville ! Ils sont voyants ces gilets jaunes et touchants… mais l’habit ne fait pas le moine et encore moins la responsabilité. Sous couvert d’expression libre, ce mouvement a ouvert la boîte de Pandore à tous les extrémistes et tous les casseurs qui veulent  briser la République ou braquer les commerces et les banques. Comble de cette fièvre urbaine, la mise en sac de l’Arc-de-Triomphe le 2 décembre a symptomatiquement symbolisé le danger de basculement de cette révolte populaire dans un séisme politique qui pourrait bien entraîner tout le monde vers l’abîme. Les gilets jaunes, idiots utiles des nihilistes et des voyous, des pilleurs et des séditieux, brûlent les voitures et provoquent les forces de l’ordre, tétanisés par le syndrome Malik Oussekine. L’économie qui tardait à redémarrer est de nouveau bloquée, la croissance va rechuter,  les touristes à peine revenus à Paris après les attentats de 2015, fuient à nouveau la France. Demain, des commerces fermeront, des employés seront au chômage. Et il faudra bien payer la facture de tous ces dégâts. Qui payera ? Le mythe de la cagnotte sous le traversin est celui d’un peuple d’enfants qui croit encore aux fées et aux sorcières.

La France de la COP21 et d’un jeune président triomphant de la candidate du front national, il y a dix-huit mois serait-elle à son tour contaminée par le populisme trumpien, les dérives bolsonariennes ou salviniennes, l’impasse du Brexit  par haine de la mondialisation, de l’Europe, de l’Etat ?  S’élever contre l’impôt et réclamer plus de protection sociale (quand parfois on bénéficie de l’autre sans payer l’un), revendiquer la liberté républicaine quand on foule le processus démocratique,  se plaindre de sa précarité et briser le bien d’autrui confinent au paradoxe. Le moindre n’est pas  la complaisance des intellectuels pour ceux qui se défient de la promotion sociale suspecte de compromission morale et de mépris de classe: prenons garde que les khmers rouges n’aient pas changé de couleur. La démocratie ne s’use que si on ne s’en sert pas, mais elle peut étouffer si on lui serre le cou.

9 décembre.

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31 octobre 2018 3 31 /10 /octobre /2018 18:27

le limogeage du Premier Ministre Ranil Wickremesinghe par le Président Maithripala Sirisena et son remplacement par l’ex-homme fort du pays, Mahinda Rajapakse, le vendredi 26 octobre, le Sri Lanka s’enfonce dans une crise politique. Le président et le Premier Ministre sortant s’étaient pourtant alliés en 2015 pour évincer M. Rajapakse, président du Sri Lanka de 2005 à 2015, et qui était accusé, alors, avec son gouvernement, de corruption et de violation des droits de l’homme dans le cadre de la guerre contre les Tigres tamouls. Depuis, les deux hommes ont cependant accumulé les divergences sur la politique et les tensions entre eux sont montées d’un cran à un an de la prochaine élection présidentielle, où tous les deux envisagent d’être candidats. Dimanche 28 octobre, deux jours après cette nomination surprise, le président Sirisena a justifié sa décision au cours d’une longue déclaration retransmise à la télévision, dans laquelle il a accusé un ministre du précédent gouvernement d’avoir préparé une tentative d’assassinat le visant. Il a également reproché au chef du gouvernement sortant d’avoir pris des « décisions individuelles » sans le concerter et d’avoir laissé prospérer la « fraude et la corruption » dans le pays. Mais le jour même, la crise constitutionnelle a pris une tournure violente quand un garde du corps d’Arjuna Ranatunga, ministre du Pétrole du gouvernement démis, a tiré sur une foule hostile qui tentait de prendre en otage ce soutien de M. Wickremesinghe, tuant un homme de 34 ans. M. Ranatunga a été arrêté le lendemain. Et, alors que la crise entrait dans son troisième jour, de longues files de clients s’étiraient devant les stations essence de Colombo. Le Président du Parlement, Kari Jayasuriya, a déclaré redouter un « bain de sang » et a réclamé, comme Ranil Wickremesinghe, une session d’urgence du Parlement suspendu par le président jusqu’au 16 novembre. Ayant fait amendé en 2015 la constitution de sorte de retirer au président le droit de limoger le Premier ministre, Wickremesinghe considère cet acte comme inconstitutionnel et déclare demeurer à son poste. En l’état actuel, le camp de Ranil Wickremesinghe-Kari Jayasuriya  (UNP) compte 105 sièges sur les 225 du Parlement et celui de Mahinda Rajapkse-Maithripala Sirisena  (SLFP) 98. La majorité des 22 députés restant devrait soutenir M. Wickremesinghe en cas de vote mais de nombreuses tractations sont en cours, selon les observateurs. La communauté internationale a appelé le président Sirisena à réunir « immédiatement » le Parlement afin de trouver une issue à la crise mais le chef de l'État n’a envoyé aucun signe en ce sens.

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31 octobre 2018 3 31 /10 /octobre /2018 18:21

Le 6 septembre 2018, alors qu’il tenait un meeting à Juiz de Fora, Jair Bolsonaro, candidat d’extrême droite à l’élection présidentielle brésilienne du 7 octobre, a été poignardé à l’abdomen en plein meeting. Son état jugé critique par les médecins qui ont constaté plusieurs perforations de son intestin grêle et la perte de 2,5 litres de sang, il a été opéré à l’hôpital de Juiz de Fora, puis transféré à l’hôpital Albert Einstein de São Paulo. Son agresseur, Adelio Bispo de Oliveira, est un militant de gauche de quarante ans qui a affirmé avoir agi « sur l’ordre de Dieu » pour « des motifs politiques, religieux, et également en raison des préjugés que montre Bolsonaro à chaque fois qu’il parle de race, de religion et des femmes ». Cette tentative d’assassinat — désavouée par la classe politique et qui a conduit à la suspension de la campagne électorale — intervenait alors dans un climat de tensions inédit pour une élection présidentielle. En février 2018 déjà, la caravane de Lula avait essuyé des tirs, qui n’avaient pas fait de blessés. Fin août, des militants du  PSOL (Parti Socialisme et Liberté, gauche) avaient été agressés alors qu’ils assistaient à un meeting électoral. Jair Bolsonaro mimait lui-même régulièrement, pendant ses meetings, le geste de fusiller ses opposants, notamment les journalistes et les militants de gauche. Rapidement, cependant, les partisans de Bolsonaro ont accusé le Parti des travailleurs (de Lula), tandis que les observateurs estimaient que l’attentat pourrait faire baisser le taux de rejet du candidat. Cette agression qui aurait pu être fatale au candidat du Parti Social Libéral (PSL), semble d’ailleurs avoir bénéficié politiquement au favori du premier tour, qui était déjà solidement installé à la première place, avec 22 % des intentions de vote (selon le sondage Ibope publié la veille de l’attentat), après l’invalidation de l’ex-président Lula, le 31 août, incarcéré pour corruption et la destitution de la présidente de gauche Dilma Rousseff en 2016 puisque le candidat d’extrême droite a finalement obtenu  55, 13% des voix (46,03 % des voix au premier tour) contre  44,87% (29,28%) à Fernando Haddad. L’absence de Bolsonaro de la campagne pendant au moins une dizaine de jours  ne l’a donc pas handicapé outre mesure. Ses 8,5 millions d’abonnés sur Facebook, Twitter ou Instagram - bien plus qu’aucun autre candidat – ont été, au contraire, galvanisés par ce statut de martyr, et ont maintenu la flamme, sous la houlette des fils de M. Bolsonaro, très impliqués. « Le fait qu’il ait été poignardé va renforcer le soutien de ceux qui prônent une politique sécuritaire musclée », avec une libéralisation du port d’arme, estimait Jimena Blanco, analyste chez Verisk Maplecroft.

Qualifié de nationaliste et populiste, Jair Bolsonaro appartient au courant conservateur dit de la « Bancada B.B.B » (pour « balle, Bible, bœuf »), qui regroupe les parlementaires liés aux intérêts de la police militaire, des églises évangélistes et de l’agrobusiness. Son électorat comprend principalement des jeunes (16-34 ans), des membres des classes moyennes et supérieures, et des habitants du Sudeste. Religieux et hostile à la laïcité, il critique l’avortement. Tout en se défendant d’être homophobe, il déclarait en 2010 tolérer les violences corporelles contre les enfants présentant des tendances homosexuelles ; il s’oppose à l’union civile entre deux personnes de même sexe. Certaines de ses déclarations ont été considérées comme misogynes. Il affiche son hostilité au principe des quotas, notamment ethniques. À propos des peuples indigènes et des Noirs, il est accusé de propager des préjugés racistes. Mettant l’accent sur l’importance de la sécurité publique, cet ancien capitaine d’artillerie de l’armée de terre se montre partisan du port d’armes, de la peine de mort et de l'utilisation de la torture contre les trafiquants de drogue. En 2008, pour réduire la criminalité et la pauvreté, il se prononçait pour un contrôle des naissances au moyen de la stérilisation forcée des individus pauvres n’ayant pas reçu éducation et des criminels. Il exprime régulièrement sa nostalgie pour la dictature militaire, qualifiant le coup d’état de 1964 de « révolution démocratique ». Au niveau économique, il s’affiche comme un défenseur du libre marché et appelle à la privatisation de plusieurs compagnies publiques; cependant, des analystes indiquent que son parcours politique n’en fait pas un partisan acharné du libéralisme économique. Il est par ailleurs favorable au renforcement des liens entre le Brésil et les États-Unis.

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28 mars 2018 3 28 /03 /mars /2018 21:54

Un vendredi noir qui nous en rappelle un autre, celui du 13 novembre 2015. Ce vendredi 23 novembre 2018, un nouvel attentat perpétré dans le village de Trèbes, dans l’Aude, a fait quinze blessés et quatre morts : Jean Mazières, viticulteur, Christian Medvès, chef du rayon boucherie du supermarché U, Hervé Sosna, maçon à la retraite et Arnaud Beltrame, lieutenant-colonel de la gendarmerie qui a pris la place d’un otage et l’a payé de sa vie. Un hommage national est rendu mercredi 28 mars à ce militaire dont l’héroïsme peine à faire taire les éternelles polémiques politiques et quelques dérapages nauséabonds. Face aux fanatismes qui exhibent leurs martyrs, notre démocratie fragile se console ou se rassure en ayant trouvé un authentique héros à panthéoniser. Mais comme le disait Bertolt Brecht, les peuples qui ont besoin de héros sont malheureux car ces êtres d’exception n’existent que par la permanence du mal et ses pouvoirs de violence, de nuisance et son lot de victimes innocentes. Ce même jour funeste du 23 mars, une vieille dame de 85 ans, atteinte de la maladie de Parkinson, a été poignardée et brûlée dans l’incendie de son appartement du XIe siècle. Selon les enquêteurs, le caractère antisémite de cet assassinat ne fait guère de doutes. Mireille Knoll était de confession juive, avait réchappé à la rafle du Vel d’Hiv et épousé un rescapé de la Shoah. Un voisin est soupçonné. Heureux les peuples qui n’auront plus besoin de héros le jour où il n’y aura plus de bourreaux, de couteaux et de tombeaux. Mais ce futur de volonté cache à son tour un conditionnel d’incertitude.

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20 février 2018 2 20 /02 /février /2018 10:08

Au nom d’un juste combat contre l’oppression des femmes et de son omerta trop longtemps considérées comme une fatalité culturelle, il faudrait prendre garde à ce que la société, dans son grégarisme et son emballement médiatique, ne franchisse pas allègrement la ligne de démarcation entre la libération de la parole, l’exigence de justice et l’impératif de respect, d’une part, et l’incitation sournoise à la délation anonyme, la surenchère vindicative et d’éventuels lynchages publics sur fond de règlements de compte politiques, d’autre part. Nous ne tomberons donc pas, à notre tour, dans ce piège de nous faire les procureurs ou les avocats du Ministre de la transition écologique, en préférant que la justice règle les affaires de droit dans l’ombre sereine de ces palais et de sa temporalité. Mais, en nous souvenant de Roger Salengro, Dominique Baudis et de Pierre Bérégovoy, nous relirons la tirade de Bazile dans le Barbier de Séville de Beaumarchais : « La calomnie, Monsieur ? Vous ne savez guère ce que vous dédaignez ; j’ai vu les plus honnêtes gens prêts d’en être accablés. Croyez qu’il n’y a pas de plate méchanceté, pas d’horreurs, pas de conte absurde, qu’on ne fasse adopter aux oisifs d’une grande ville, en s’y prenant bien : et nous avons ici des gens d’une adresse ! ... D’abord un bruit léger, rasant le sol comme hirondelle avant l’orage, pianissimo murmure et file, et sème en courant le trait empoisonné. Telle bouche le recueille, et piano, piano vous le glisse en l’oreille adroitement. Le mal est fait, il germe, il rampe, il chemine, et rinforzando de bouche en bouche il va le diable ; puis tout à coup, on ne sais comment, vous voyez calomnie se dresser, siffler, s’enfler, grandir à vue d’œil ; elle s’élance, étend son vol, tourbillonne, enveloppe, arrache, entraîne, éclate et tonne, et devient, grâce au Ciel, un cri général, un crescendo public, un chorus universel de haine et de proscription. Qui diable y résisterait ? » Les femmes et les hommes auraient tout à perdre à chasser cette hirondelle qui fait le printemps de nouveaux rapports humains pour plonger dans l’atmosphère du Corbeau de Clouzot en écoutant les gazouillis pernicieux de l’oiseau bleu de Twitter ou les glapissements délétères d’autres rapaces de mauvaise augure.

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20 février 2018 2 20 /02 /février /2018 10:06

Le président tchèque sortant Milos Zeman, 73 ans, a été réélu samedi 27 janvier pour un deuxième quinquennat, devançant l’académicien (ex-patron de l’Académie des sciences) pro-européen Jiri Drahos, 68 ans,  de trois points (51,5% contre 48,5%). Mettant en lice deux candidats radicalement différents, le scrutin a polarisé la société tchèque autour de la question de l’immigration et de la politique étrangère du pays, membre de l’Otan depuis 1999 et de l’Union européenne depuis 2004.  La politique eurosceptique pro-russe et pro-chinoise de Zeman n’est certes pas partagée par la majorité des Tchèques mais le véritable enjeu qui oppose d’un côté Prague et les grandes villes et les milieux intellectuels et, de l’autre, les milieux ruraux et des travailleurs manuels, est la question migratoire. Connu pour ses discours anti-migrants, Zeman avait déclaré,  peu après son élection, en 2013 : « La confrérie des Frères musulmans ne peut pas lancer une guerre contre l’Europe, elle ne dispose pas de moyens, mais elle peut préparer une vague croissante de migrants pour prendre progressivement le contrôle de l’Europe ». Réélu à la tête de l’Etat, Zeman pourrait également désigner pour la deuxième fois pour former le nouveau gouvernement l’ex- Chef du gouvernement Andrej Babiš qui avait présenté sa démission le 17 janvier. Le milliardaire populiste allié de Zeman est sur le coup d’une inculpation pour fraude aux subventions européennes qui lui a valu de perdre la confiance du Parlement ce qui ne semble pas gêner le président réélu.

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10 janvier 2018 3 10 /01 /janvier /2018 21:00

Ça durera ce qu’Honduras ! Le Honduras, pays d’Amérique centrale de neuf millions d’habitants, était censé élire, lors du scrutin uninominal à un tour du 26 novembre, son nouveau Président de la République ainsi que 128 députés au Congrès, 20 députés au Parlement centraméricain, 298 maires et autant de vice- maires et 2098 conseillers municipaux.  Si les élections législatives ont abouti à un parlement sans majorité où le Parti national (de droite) conserve une majorité relative, la situation est beaucoup plus confuse en ce qui concerne l’élection présidentielle. Le Tribunal suprême électoral n’ayant toujours pas publié les résultats définitifs (il a jusqu’au 26 décembre pour annoncer le vainqueur), le président sortant, Juan Orlando Hernández, au pouvoir depuis 2014, et son adversaire de gauche, l’ancien présentateur sportif Salvador Nasralla, revendiquent tous deux la victoire. Les premiers résultats avaient donné une avance de cinq points au candidat de l’opposition, mais la tendance s’est ensuite inversée (42,98 % pour Hernández du Parti national et 41,38% pour Nasralla et l’alliance du Parti Liberté et refondation et du Parti de l’innovation et de l’unité) et, selon l’Organisation des Etats américains (OEA), le scrutin a été entaché d’irrégularités. Le camp Nasralla a jugées suspectes, en particulier, les nombreuses pannes informatiques au moment du dépouillement. Après avoir demandé que l’on recompte les voix, le candidat de l’opposition réclame maintenant l’annulation pure et simple du scrutin. Ce qui complique la situation, c’est que le président Hernández n’était pas censé se représenter en vertu de la Constitution. Mais une décision de la Cour suprême de justice en 2015 puis un vote en 2016, ont balayé cette interdiction provoquant une violente réaction de l’opposition et un fort rejet de la population. Le mandat d’Hernández a d’ailleurs été émaillé de scandales, comme le financement de la campagne de son parti en 2013, qui a été prélevé sur l’organisme de sécurité sociale ou la révélation des liens avec le narcotrafic d’un de ses ministres et de son propre frère. La corruption générée par le narcotrafic et la puissance des « maras », ces bandes de jeunes criminels si puissantes qu’elles ont instauré une forme de gouvernance parallèle au plus haut sommet de l’Etat, gangrènent un des pays les plus pauvres du monde où la pauvreté touche plus de 60% de la population et où le taux d’homicide et d’assassinats politiques est l’un des plus élevés de la planète. Depuis le 27 novembre, les manifestations se multiplient à Tegucigalpa, la capitale et dans tout le pays. Le gouvernement a décrété l’état d’urgence et au moins quatorze personnes ont été tuées lors d’affrontements avec les forces de l’ordre selon Amnesty International. Dans les états voisins, on craint une dérive à la vénézuélienne.

PS :  L’élection de Juan Orlando Hernandez a été confirmée le 17 décembre. Le Président sortant a donc été réélu avec 42,95% contre 41,24% à Salvador Nasralla

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10 janvier 2018 3 10 /01 /janvier /2018 20:56

On est conditionnés par nos goûts d’adolescence et de jeunesse dans lesquels entre une grande part d’enthousiasme excessif, de certitude précipitée et de manichéisme puéril, tant nous sommes influencés à notre insu par notre environnement culturel, au moment où l’on croit revendiquer notre originalité, notre indépendance, voire notre émancipation. Et nous charrions ensuite ces inclinations circonstancielles que l’on assimile un peu hâtivement à une forme de personnalité, comme des bagages intellectuels qui grossissent comme notre tour de taille, avec la force de l’habitude et le poids de la nostalgie. A cet âge où se forgent les choix musicaux, on écoutait Brel, Brassens, Ferré, Ferrat, Reggiani, Moustaki, Barbara,  Nougaro, Aznavour, Gainsbourg, Le Forestier, Julien Clerc, Souchon, Cabrel, Fugain, Renaud… du côté de la chanson française,  Bob Dylan, Leonard Cohen,  Neil Young, Simon & Garfunkel, les Beatles, Eagles, Yes, Genesis, les Pink Floyd, Deep Purple, Santana, David Bowie, Queen, Dire Straits,… pour la musique (plus que pour les paroles que nous ne comprenions pas). C’était aussi l’époque du folk aux accents régionalistes avec Tri Yann, Alan Stivell, Mélusine et autres Malicorne dont l’authenticité était censée contraster avec les plagiats des hit-parades.  

Johnny Hallyday, vedette yéyé des années 60, était déjà démodé en cette fin des années 70 et il semblait symboliser à lui seul tout ce que nous croyions détester : une chanson de variété singeant les modèles anglo-saxons en se contentant de (mal) traduire les paroles, en s’affublant de pseudonymes pseudo-américains (Dick Rivers, Eddy Mitchell, Johnny Hallyday), un produit marketing fabriqué par les maisons de disques et les magazines pour la jeunesse (que nous n’appelions pas encore télé-réalités et magazines people) déclenchant déjà des phénomènes d’hystérie collective et de fanatismes jugés par nos consciences juvéniles comme grégaires et navrants.  Ni auteur, ni compositeur (donc pas véritablement chanteur dans notre esprit), Johnny Hallyday paraissait être coupable de n’être qu’un interprète (alors que Montand, Piaf et Reggiani n’étaient guère plus) sans grande créativité musicale autre qu’un grand sens de l’opportunisme commercial pour accompagner les modes du moment au gré d’un transformisme capillaire et vestimentaire bien peu personnel (yéyé, rockeur, hippie, country,…). Rebelle préfabriqué dans ses costumes à paillettes, il passait aussi pour être, avec Sardou, peu « réceptif » à ce que l’on appelait la « chanson engagée » et ce positionnement politique supposé semblait l’exclure définitivement de la « bonne culture »… FORCEMENT de gauche ! Enfin, ultime paradoxe, il fallait bien constater que celui que certains voyaient comme l’« Elvis national », le plus américain des chanteurs français laissait manifestement totalement indifférents les étrangers qui préféraient légitimement les originaux à la copie (les concerts à Las Vegas étant essentiellement remplis par des charters de fans venus de France).  Preuve s’il en fut de sa disqualification sur l’échelle de Richter de la culture française.

On reste ensuite indéfiniment sur ses préjugés et on ne cherche pas à comprendre la complexité des choses et des êtres. On passe ainsi à côté de certains écrivains, de certains réalisateurs et de certains chanteurs définitivement étiquetés. Il faut pourtant probablement un peu plus que la superficialité intellectuelle, l’opportunisme commercial, le caméléonisme musical et l’illusion médiatique pour faire une carrière de près de soixante ans, pour remplir les salles et les stades et attirer les meilleurs auteurs et musiciens, voire les réalisateurs les plus inattendus comme Godard. Le jeune yéyé se déhanchant sur scène s’est assurément bonifié avec le temps et sa voix, son énergie, sa présence scénique ont imposé dans l’univers musical français des chansons qu’on s’est tous surpris à fredonner, parfois à notre corps défendant. Force est de reconnaître que Johnny Hallyday était une « bête de scène » capable de faire vibrer la fibre de l’émotion auprès d’un large public et que le qualificatif de « chanson populaire » ne mérite pas le mépris des bien-pensants ou de nos jeunes suffisances. Une dernière fois cependant, l’emballement médiatique au moment de la mort de « l’idole des jeunes », devenu plutôt « l’icône des vieux », nous a exaspérés par son caractère hyperbolique et emphatique. On a cru revivre avec la mort de Johnny le phénomène qui avait totalement occulté, en 1963, la disparition de Cocteau au moment de la mort de Piaf : la malice savante et séduisante d’un Jean d’Ormesson emporté par les décibels tonitruants du rockeur. Et puis le spectacle du deuil de la famille et de l’émotion sincère de ces « fans » a attendri notre sévérité alors que « s’éteignait le feu ». Le temps fera donc la part des écumes partisanes, des outrances médiatiques et de l’importance artistique et sociologique de cet artiste adulé et moqué pour lui trouver demain sa place dans l’histoire loin de ces clivages un peu stériles.

Lu sur une copie d’élève : « Johnny est mort d’un concert ». Commentaire bas rock !

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10 janvier 2018 3 10 /01 /janvier /2018 20:53

Comme on caillasse les médecins et les pompiers dans certaines cités, on aime bien, en France, tirer sur les fonctionnaires, ces paresseux parasites perclus de privilèges qui paralysent l’Etat de leur inertie réactionnaire et grèvent son budget de rentes et de retraites ruineuses. A longueur de campagnes électorales et de plateaux télévisés en continu, des politiciens monomaniaques de la dette et de pseudo-experts en régimes sociaux amaigrissants et en remèdes libéraux drastiques, comme Mme Agnès Verdier-Molinié, s’impatientent de tailler dans la carcasse de la fonction publique comme des équarisseurs en transe. Parmi ces fonctionnaires honnis des contempteurs du sévice public, les enseignants semblent être la pire engeance. Car non contents de se repaître du sang du Trésor national, ils seraient les agents rampants d’une sédition intellectuelle et d’une déculturation inexorable. Responsables de l’incurie linguistique, de la néscience endémique et du chômage compulsif du fait d’un enseignement archaïque déconnecté du marché, les enseignants, membres factionnaires d’une secte endogame, seraient de surcroît les zélateurs d’un hédonisme non mercantile et les prosélytes  d’un sens critique narcissique contre-productif. Ces professeurs repus de vacances, absentéistes chroniques et rétifs à toutes formes de réformes sont ainsi passés progressivement du statut de hussard noir de la République et défenseur de la laïcité à celui de bouc émissaire ou de mouton noir des rumeurs et des humeurs médiatiques qui servent d’opinion générique entre deux spots de publicité. Il ne faut pas s’étonner, dans ces conditions, du peu de respect de certains parents et de quelques élèves pour ces hérauts de la culture qui ne gagnent pas des salaires de footballeurs ou d’acteurs et n’ont pas droit aux hommages nationaux à la Madeleine (de Proust ?). Mais comme le disait Abraham Lincoln, « si vous trouvez que l’éducation coûte cher, essayez l’ignorance ». Il est fort à parier qu’une société qui méprise ces enseignants soit une société qui néglige ses propres enfants.

 

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10 janvier 2018 3 10 /01 /janvier /2018 20:51

Ancien joueur de football au PSG, à l’AS Monaco, à l’AC Milan, unique ballon d’or du football africain en 1995, Georges Weah est arrivé en tête au premier tour des élections présidentielles libériennes le 10 octobre dernier. Avec 38,4% des voix, le candidat de la Coalition for Democratic change (CDC) devance nettement le vice-président sortant, Joseph Boakai (28,8%) et les dix-huit autres prétendants, dont l’avocat Charles Brumskine (9,3%) et l’ancien dirigeant de Coca-Cola Afrique, Alex Cummings (7,2%). C’est la troisième fois que « Mister George » se présente au poste suprême. En 2005 et en 2011, il avait été battu par Ellen Johnson Sirleaf qui devint ainsi la première femme à diriger un état africain. La corécipiendaire du prix Nobel de la Paix de 2011 qui ne se représentait pas  en 2017, a soutenu plus que mollement son ancien vice-président surnommé « Sleeping Joe » pour sa propension à s’assoupir en public. La voie semblait donc ouverte pour l’enfant de Gibraltar, quartier déshérité de Monravia, devenu le Libérien le plus célèbre et qui est devenu une idole dans un pays où le football est une véritable religion. Mais suite à des plaintes pour fraude déposées par Charles Brumskine, la Cour suprême a décidé de reporter sine die le second tour des élections prévues le 7 novembre. De fait, la victoire de Georges Weah ne semble plus aussi évidente. A rebours de la popularité dont il jouit auprès de la jeunesse, l’ancien footballeur est considéré avec beaucoup de mépris par les aristocrates de l’establishment politique libérien qui doute de l’intelligence et de la compétence du candidat qui a abandonné l’école avant le baccalauréat et a été surpris en flagrant délit de mensonge en prétendant détenir un diplôme de management. Depuis son élection au Sénat en 2014, il ne semble guère actif et présent. D’autres adversaires lui reprochent également d’avoir choisi comme colistière Jewel Howard Taylor, ex-femme de Charles Taylor, qui régna sur le Libéria de 1997 à 2003, avant d’être condamné pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité à une peine de cinquante ans qu’il purge dans une prison britannique. Se posera également la question de la capacité du Liberia à conserver son statut de protégé des donateurs internationaux, qui lui versent environ 750 millions de dollars [635 millions d’euros] chaque année depuis la fin de la guerre civile. Ancienne économiste de la Banque mondiale diplômée d’Harvard, Ellen Johnson Sirleaf a gouverné de manière suffisamment efficace pour obtenir un allègement important de la dette de son pays. Il n’est pas certain que les donateurs se montreront aussi indulgents à l’égard du Liberia si la cour de King George inclut l’ex-femme de Taylor, en particulier si c’est elle qui tient les rênes du pouvoir. A l’apogée de sa carrière sportive, Georges Weah qui vivait confortablement en Europe avait choisi de devenir ambassadeur de bonne volonté de l’UNICEF et de promouvoir la formation professionnelle pour les anciens soldats. Il avait également apporté un large soutien financier aux bourses d’études et programmes pour jeunes footballeurs du Libéria et a entraîné l’équipe nationale. Alors, atteindra-t-il son but ?

PS : L’ancien footballeur Georges Weah a finalement été élu, le 26 décembre 2017, Président de la République du Libéria

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