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11 juin 2023 7 11 /06 /juin /2023 17:19

LE SILENCE ET LA COLERE de Pierre Lemaître, Calmann-Lévy, 2023.

Avec Le Grand Monde, Pierre Lemaître, l’auteur de la magistrale trilogie des Enfants du désastre, a entamé  en 2022, une nouvelle saga intitulée Les années glorieuses  et mettant en scène les membres d’une famille, les Pelletier. Les aventures d’Étienne, de Jean, de François, d’Hélène et de leurs parents Louis et Angèle, en 1948, entre l’Indochine, Beyrouth et Paris ont séduit les lecteurs frustrés de la fin de la première saga et suscité une attente importante pour connaître le prolongement de nombreux dossiers laissés ouverts. Hormis Étienne, mort en Indochine, on retrouve les deux frères Jean et François et surtout une Hélène qu’on avait laissée à dix-neuf ans et qui va prendre ici une toute nouvelle dimension. En 1952, les Pelletier ont leurs problèmes de famille mais sont confrontés également aux nombreux événements de la société de l’époque.

Attention ! La suite du texte dévoile l’intrigue. Si vous n’avez pas encore lu le roman, passez au 2. Critique.

 1. Résumé détaillé.

I. Février 1952

1. Chacun avait ses raisons.

Malgré la mort d’Étienne, quatre ans plus tôt, Louis tenait à perpétuer le pèlerinage annuel en l’honneur de la savonnerie bien que chacun essayât de s’y soustraire. D’autant que Nine, qui occupait toute la vie de François, avait disparu depuis son voyage en Normandie. Il était tombé amoureux au premier regard de cette petite brune de vingt-six ans qui travaillait chez Léon Florentin dans la reliure d’art et la restauration de livres anciens. Sourde depuis son adolescence, Nine avait passé une enfance modeste à Courbevoie, sa mère était disparue précocement et son père avait été un professeur médiéviste médiocre avant de mourir alcoolique. Au Journal du Soir, François avait assisté distraitement à la conférence de rédaction opposant Stan Malevitz, le rédacteur en chef chargé des faits divers et Arthur Baron le responsable de la politique et de la diplomatie. Mais ce jour-là, Malevitz était absent : on se moquait de lui parce qu’il avait une crise d’appendicite à cinquante-sept ans. François assurait l’intérim. Denissov avait alors en tête de publier une série d’articles provocateurs sur « la propreté des femmes » rédigés par un certain « Forestier ».

François qui devait partir pour Beyrouth, était inquiet de la disparition de Nine. Hélène l’était beaucoup moins. Pour l’heure, elle cherchait un cadeau pour Colette, sa filleule, la fille de Jean, qu’elle adorait et qui avait presque trois ans. Hélène, jolie blonde de vingt-six ans, habitait rue de la Grange-aux-Belles, dans le Xe arrondissement, un petit deux pièces dont la moitié était occupée par son labo-photo, avec Joseph, le chat d’Étienne qu’elle avait rapporté d’Indochine. Il fallait qu’elle s’explique avec François. Quinze jours plus tôt, une conversation anodine d’Hélène avec Denissov sur la propreté d’une secrétaire, Mlle Blanche, avait abouti à la proposition du rédacteur en chef de faire cette enquête sur l’hygiène féminine par le biais d’un questionnaire. Elle deviendrait ainsi journaliste aux enquêtes sociales, ce dont François avait toujours rêvé. Malgré le pseudonyme, François ne serait pas dupe. D’autant qu’Hélène entretenait une relation avec Denissov. La conversation avait d’ailleurs eu lieu dans une chambre d’hôtel où ils se retrouvaient régulièrement. Faudrait-il attendre l’occasion du repas dominical chez Jean pour en parler ? Son frère aîné paraissait si torturé. Trois ans plus tôt, il avait ouvert un magasin nommé Dixie, vendant du linge de maison à un prix abordable. Face au succès, il avait eu l’idée d’une surface plus grande et d’ajouter des vêtements féminins, malgré la réticence de Geneviève qui n’avait que mépris pour ces produits bon marché. Jean avait trouvé des locaux à l’angle de la place de la République mais il était effrayé par la tâche. Il avait dû louer un entrepôt à Montreuil et engager six manutentionnaires et deux administratifs, plus quinze ouvrières et deux manutentionnaires dans le magasin pour préparer l’ouverture. Geneviève était très dépensière depuis la naissance de Colette et elle avait exigé de déménager. Ils avaient ainsi trouvé une trois pièces rue de Paradis. « Rien de ce que faisait Jean ne trouvait grâce aux yeux de son épouse » (39). Geneviève se refusait à son mari qu’elle qualifiait d’impuissant. Jean faisait remonter la conception de Colette à septembre 1948, date à laquelle elle était revenue de Beyrouth pour l’enterrement de sa mère. Sans doute avait-elle revu un amour de jeunesse ? Geneviève était de nouveau enceinte et cette seconde grossesse était pour Jean encore plus mystérieuse. Selon lui, « Geneviève était venue dans sa vie pour lui faire expier ses péchés » (34). La découverte du Salon des Arts ménagers en 1951 puis en 1952 avait entraîné Geneviève à multiplier les achats impulsifs et dispendieux.

Jean était allé à Charleville pour négocier des tarifs avec un fournisseur de jupes et de chemisiers. Il était dans le train qui le ramenait à Paris. En sortant dans le couloir, il revit la femme qu’il avait observée la veille au restaurant en pleine romance avec un homme. Les ébats bruyants s’étaient prolongés dans la chambre d’hôtel mitoyenne de la sienne. La femme reconnut Jean : « Avant de prendre conscience de ce qu’il faisait, Jean avait bondi, l’avait empoignée par les cheveux et lui frappait violemment le crâne contre la vitre, une fois, deux fois, de toutes ses forces. Le corps de la femme abandonna bientôt toute résistance. Jean la tira, toujours par les cheveux, sur le sol de la plateforme, l’enjamba, ouvrit la porte qui donnait sur la voie, le vent glacé lui fouetta le visage, il se retourna et, saisissant le corps de la femme sous les aisselles, il le roula jusqu’aux marches d’accès au wagon et le bascula dans le vide. Il referma la porte ». (37) Il avait essuyé le sang avec son mouchoir qu’il avait remis dans sa poche et il était rentré dans son compartiment qu’il partageait avec un seul voyageur.

La seule personne que la « procession Pelletier » réjouissait était Geneviève, non pas pour revoir ses sœurs et son père qu’elle détestait mais pour voyager comme une millionnaire, en première classe. Négligente avec Colette, Geneviève se montrait cruelle et blessante avec Jean. C’est pourtant elle qui lui suggéra de prendre un gérant et de choisir… M. Guénot avec qui ils avaient eu maille à partir. « Nous avons besoin d’un voleur expérimenté ; j’ai tout de suite pensé à vous. » (43). Dans son domaine, Guénot était un prototype pour escroquer les gens. A la maison, Geneviève ne prêtait guère attention à sa fille qui grimpait partout et tombait souvent.

2. Pour le moment, personne ne le sait.

François n’avait toujours aucune nouvelle de Nine. Il décida de passer chez elle, rue Jean Goujon. En fouillant son appartement, il découvrit dans un carton des montres de femme, des briquets, une épingle de cravate, plusieurs stylos de luxe… Accablé, François vida le contenu dans un cabas et repartit. Arrivé à la gare Saint-Lazare, il appela André Lecoeur, correspondant du Journal du Soir en Normandie qui lui apprit qu’elle était… au commissariat. François et Lecoeur se donnèrent rendez-vous à 17h30. François réussit à attraper le train de 14h30. Durant le voyage, il se rappela un incident survenu en décembre : aux Galeries Lafayette, il avait vu Nine glisser un stylo dans son sac. Le lendemain, il l’avait jeté dans un égout. Il balança le contenu du cabas par la fenêtre. Arrivé à Rouen, il prit un taxi pour le commissariat. Lecoeur était déjà là. Il lui expliqua qu’elle avait été arrêtée aux Galeries rouennaises et qu’elle s’était montrée muette au commissariat. Elle sentait l’alcool. « C’est ma fiancée, dit François, elle est alcoolique et kleptomane. Et sourde ». Lecoeur connaissait Boildieu, le propriétaire des Galeries (il avait été l’amant de sa femme). Quelques temps plus tard, Lecoeur était ressorti du commissariat suivi de Nine.

3. Et bien sûr, tu ne t’es rendu compte de rien.

Malgré le déménagement de la Porte de la Villette à la rue de Paradis, Geneviève avait tenu à garder Mme Faure, quitte à doubler ses gages pour qu’elle traverse Paris deux fois par semaine (trois quand la famille recevait). Geneviève méprisait Hélène et Nine, la première parce qu’elle était encore célibataire à vingt-trois ans, « quant à la sourdingue, elle, c’est encore pire, elle a coiffé Sainte-Catherine ! On aurait dû lui offrir un chapeau avec des clochettes, ça ne l’aurait pas beaucoup dérangée » (55). Lors du rituel repas dominical, on évoqua le voyage à Beyrouth. Enceinte de sept mois, Geneviève ne pouvait y aller en bateau. Elle irait donc en avion avec l’approbation de Louis (et les réserves des autres). Jean, comme d’habitude, courbait l’échine : « personne n’était à même d’imaginer ce que pouvait être l’enfer vécu par ce pauvre homme ». (56) Sous prétexte de grossesse, il fallait la servir sans arrêt. En plus de ces caprices, elle harcelait son mari pour de supposées frasques, le dotant d’un tempérament priapique, tout en le disant impuissant (sans se préoccuper de cette contradiction). Nine ne participait pas à cette conversation sur Beyrouth. Mais cette famille la faisait rire. « Ça me console de ne pas en avoir » (57).

La conversation s’orienta sur le travail de Jean. Là encore, Geneviève se plaignait de lui. Jean n’était jamais là. La dernière édition du journal titrait sur l’événement du train Charleville-Paris

Une voyageuse jetée hors du train Charleville-Paris

La jeune femme, plongée dans un coma profond, est entre la vie et la mort.

            Jean fut obligé d’admettre qu’il était dans ce train mais que personne ne s’était rendu compte de rien. On avait trouvé la jeune femme sur le ballast deux heures après son passage. Jean pensa alors à son mouchoir taché de sang. Jean parcourut le journal. Grâce à son sac retrouvé dans le compartiment, on avait appris que la jeune femme s’appelait Antoinette Rouet. Elle avait vingt-cinq ans, était couturière et habitait au 34 boulevard Richard Lenoir à Paris. Elle devait se marier dans moins de trois semaines, ce qui excluait la tentative de suicide. La police avait lancé un appel à témoins. De cet article, la conversation glissa sur l’enquête sur la propreté. Soudain, François hurla : « Tu es une salope ! » « Je ne vole rien » dit calmement Hélène. (62) Le ton monta :

  • « Il y a longtemps que tu couches avec lui ? demanda François. […]
  • Le jour où je penserai utile de te demander la permission pour coucher avec quelqu’un, je te le ferai savoir. » (63)

Tout le monde se sépara sur cette dispute. François était résolu à quitter le Journal. Jean était obsédé par son mouchoir qu’il ne retrouvait plus.

4. Qu’est-ce que vous avez fait ?

Armand Palmari, Inspecteur de la Protection des mineurs et de la natalité, autrement dit du Service de répression de l’avortement clandestin, demanda à être reçu par le directeur du laboratoire Delaveau à Châteauneuf. Le Dr Marelle l’avait averti de cette probable visite. Le poste avait été inoccupé pendant près de deux ans et la nomination de ce nouvel inspecteur il y a deux mois avait surpris tout le monde. Il y avait des années que la lutte contre l’avortement avait été reléguée loin des priorités politiques, d’autant qu’on était en période d’accroissement des naissances. Palmari voulait demander des comptes sur le nombre de lapins utilisés par le laboratoire. Selon le test de Friedman, ces animaux servaient à vérifier si des femmes étaient enceintes. Le directeur se souvenait des propos de Marelle : « En matière de chasse à l’avortement, il a fait des merveilles sous Vichy, des merveilles à la Libération ! Il regrette que cette lutte soit un peu délaissée, alors il met les bouchées doubles. […] C’est un pervers. L’avortement, c’est son combat. Il paraît qu’il est assez innovant dans sa spécialité. […] A Lyon, on l’appelait le Croisé » (67). Sur le trottoir, il consulta sa liste : il y avait trois autres établissements à Châteauneuf. Il n’avait pas laissé à son collaborateur, Jean Cosson, le soin d’effectuer ce relevé.

Le Dr Marelle n’avait pas tout à fait raison. Palmari n’était pas un pervers mais un nostalgique. Avant-guerre, il était commissaire à la préfecture de police, à la tête d’une brigade d’une douzaine d’agents chargés de la lutte anti-avortement. Avec l’Alliance nationale pour l’accroissement de la population française. Ils avaient ainsi fait inculper des dizaines de soignants au mépris de toute règle. Il était considéré comme un tireur d’élite. Par rapport à cette période, le régime de Vichy l’avait presque déçu. Mais il restait vindicatif. Il avait épousé Augustine de Breville et ils avaient eu quatre filles. Son beau-père avait voulu faire de lui un sous-préfet mais Palmari avait tenu à rester dans la police. M. de Bréville ayant pactisé avec l’occupant tomba dans la misère, Palmari jugé « serviteur servile du gouvernement de Vichy et des autorités allemandes » fut suspendu en 1944 pour une période de dix ans. Avec le jeu des remises de peine, il fut pourtant réintégré au grade secondaire d’inspecteur. Nommé d’abord à Lyon, puis à Châteauneuf, il travaillait avec Jean Cosson, un collaborateur stupide. Sa fille aînée Guilaine, attendait son second enfant. Son supérieur hiérarchique, le commissaire divisionnaire Peyrot, membre historique de l’Alliance nationale lui laissa les coudées franches. A la fin de la journée, Palmari avait trouvé les noms de deux patientes positives au test et qui ne s’étaient pas présentées à la maternité. Il fit alors convoquer la jeune Georgette Bellamy, femme de ménage chez le Dr Marelle et il commença son interrogatoire. Il menaça de l’inculper pour qu’elle espionne pour lui.

5. Qu’est-ce que tu aurais fait à ma place ?

François rendit visite à Malevitz à l’hôpital. L’édition du jour du Journal présentait deux articles phares. Le premier annonçait que la jeune femme du Charleville-Paris avait repris connaissance, le second parlait du manque d’hygiène des femmes. Le ministère de la Santé qui s’était d’abord félicité de cet article en était revenu face au tollé. Les articles d’Hélène pointaient d’autres culpabilités : la vétusté du logement en France, l’absence de douches, de WC intérieurs, d’eau courante. Le journal se vendait bien. Denissov voulait envoyer François en reportage à Chevrigny, près de Châteauneuf, dans l’Yonne. Dès 1936, l’État avait lancé une étude pour la construction d’un barrage sur la Serre et d’une centrale hydroélectrique alimentant toute la région. Les travaux, commencés avant-guerre, ne s’étaient pas arrêtés. La vallée qui allait être noyée, abritait Chevrigny, un village d’un millier de personnes dont la moitié refusait de partir. François était bien décidé à démissionner mais Denissov lui demanda d’attendre le retour de Malevitz.

En attendant, François faisait des journées doubles tout en préparant son voyage à Chevrigny. L’épisode de Rouen avait brisé quelque chose entre lui et Nine. Elle lui reprochait d’avoir fouillé chez elle. François parla de Nine à Hélène. Sa nomination pour Chevrigny avait apaisé leurs relations. Il avait mauvaise conscience d’avoir tardé à aider Étienne. « Ainsi entre le silence concernant Étienne et la colère due à leur rivalité professionnelle, ils craignaient de se retrouver seuls, ensemble et furent tous deux soulagés que François soit venu à propos de Nine. » (84) Il lui raconta l’épisode de Rouen, l’attitude de Lecoeur. Hélène pensait que c’était lié à sa fille droguée et dépressive. Elle s’était jetée sous une voiture, il y a une dizaine d’années. Après le départ de son frère, Hélène songea à la proposition du mensuel Femmes heureuse, créé six mois plus tôt. On lui proposait un poste aux « grandes enquêtes ». Elle était bien décidée à accepter dès son retour de Beyrouth. Chez Jean, Colette s’était rendormie. « Fais la taire cette braillarde où je fais un malheur » avait dit Geneviève. Jean avait deux graves soucis : la miraculée du Charleville-Paris était sortie du coma et le mouchoir avait disparu.

6. Vous sortez de chez Borniol ?

A l’aéroport, Geneviève fit scandale auprès de l’employée d’Air France. « Elle relevait moins de la nymphomane que de la mante religieuse » (89). Et elle reprocha à François et à Hélène d’arriver en retard par une remarque déplacée : « Vous sortez de chez Borniol tous les deux ? » (En référence à une entreprise de pompes funèbres). De fait, Stan Malevitz était décédé quatre jours plus tôt dans son sommeil d’une rupture d’anévrisme et les funérailles avait eu lieu le matin à dix heures. François l’avait encore vu la veille. François avait appris qu’il avait beaucoup de relations dans le métier et dans le milieu du cyclisme, qu’il avait été un grand résistant. La foule s’était réunie au cimetière Saint-Vincent pour lui rendre hommage. « Je veux que tu reprennes le poste de Stan », avait dit Denissov à François. Ce n’était pas vraiment ce qu’il voulait. C’est ce jour-là aussi qu’Hélène avait annoncé à Nine qu’elle était enceinte.

L’hôtesse connut enfin un répit quand Geneviève s’endormit et se mit à ronfler. Conséquence de la nomination de François, c’est Hélène qui irait à Chevrigny. Jean suivait l’affaire de Charleville dans l’Est éclair : l’appel à témoin avait fait resurgir le serveur blond du restaurant ; il avait parlé d’un client excité par la présence de ce jeune couple amoureux. Mais il était incapable de le décrire. Le journal confirmait qu’Antoinette Rouet s’apprêtait à témoigner. Il avait finalement retrouvé son mouchoir : il était propre et plié dans sa valise que Geneviève avait tenu à organiser elle-même.

7. C’est juste pour aider un peu, tu vois…

Lorsqu’il avait aperçu Geneviève à l’aéroport, Louis Pelletier avait compris qu’il devrait changer ses plans pour la cérémonie : il avait promis une surprise. Le dimanche matin, il avait commandé deux taxis en leur demandant d’avancer lentement vers la savonnerie. L’arrêt au Café des Colonnes fut écourté. Nine, dans une lettre demandait d’excuser son absence pour raisons professionnelles. Louis avait maladroitement levé son verre à la nouvelle génération. Angèle s’inquiétait pour Colette en découvrant des hématomes sur elle. Louis commit une nouvelle gaffe en évoquant l’article sur la propreté des femmes. « Cette Forestier, elle nous en apprend ! elle est comment d’ailleurs ? » (101) Pour couper court à cette question, Hélène avait annoncé que François avait été nommé rédacteur en chef des faits divers. François avait transmis son dossier Chevrigny à Hélène. Louis enchaîna sur la victoire de Lulu en seizième de finale du Trophée. Lucien Rozier, jeune ouvrier de la savonnerie était boxeur amateur. La surprise consistait donc à amener tout le monde au Sidon assister à la huitième de finale contre Charles Berjaoui. Tout le monde connaissait Lulu embauché quatre ans plus tôt comme manutentionnaire et rapidement devenu ouvrier. A douze ans déjà, il fréquentait les salles d’entraînement ; il éprouvait une véritable vénération pour Marcel Cerdan devenu champion du monde en 1948. Louis avait assisté à tous ses combats. Son entraîneur Hamid Mokkadem poids lourd champion du Liban dans les années 30 qui avait débarqué à Beyrouth après une belle carrière en Égypte, reportait plutôt ses espoirs sur un autre poulain Salim Nakhlé, favori des amateurs. Le tirage au sort avait pourtant décidé que les deux hommes seraient face à face. Lulu l’avait battu. Angèle se proposa pour garder Colette ; contrairement à son mari, elle avait la boxe en horreur. Dès le parking, on entendait les hurlements des spectateurs. Outre les primes pour les boxeurs, le combat suscitait des paris clandestins. Louis avait financé une affiche de réclame placardée dans la salle. Pendant le combat, Jean revit la tête de la voyageuse contre la vitre du train. Les coups de Berjaoui pleuvaient sur Lucien. Puis soudain Lucien reprit le dessus et gagna. Il fut porté en triomphe.

De retour à la maison, Louis tentait de reconstituer le calendrier de ses dernières années : Mme Cholet était morte en septembre 1948. Louis était allé chercher sa belle-fille à l’aéroport. Que s’était-il passé ensuite ? Colette était née le 19 juin 1949. « Louis compta : neuf mois. […] ce qui avait attiré l’attention de louis, c’est le grain de beauté qu’il avait vu sous l’aisselle de Lucien quand il avait retiré son maillot. Le même exactement, et au même endroit, que celui de la petite Colette. » (118)

8. Enfin quelque chose d’intéressant.

Pour Palmari, Cosson avait deux atouts : sa capacité à passer du temps sur des dossiers et à faire des notes lapidaires. Autre avantage : il faisait peur par son mutisme. Il l’avait envoyé chercher Georgette Bellamy. Elle avait été terrorisée et elle était son informatrice depuis quinze jours. Il l’interrogea sur les docteurs Chiche, Vanacker et Marelle. Au laboratoire Bauche, des spéculums et des sondes disparaissaient le vendredi soir pour réapparaître le lundi matin. Palmari voulait que Georgette lui fournisse des renseignements.

9. Maintenant. Tout de suite.

Hélène était inquiète par sa grossesse. Sa mère l’avait remarqué. « Si l’avortement était une affaire de femmes, sa répression était principalement une affaire d’hommes » (124). Le législateur de 39 avait accru la répression qui s’était encore renforcée en 42, élevant l’avortement au rang de crime contre la sûreté de l’État. Marie-Louise Giraud et Désiré Pioge avaient été guillotinés en 43. Au cours de ces années sombres, aiguillonné par l’Alliance nationale contre la dépopulation, une association de natalistes exaltés, le législateur imagina de sanctionner sans preuve. La répression à la Libération avait été pire que sous le régime de Vichy. En 1946, on comptait mille comparants de plus qu’en 1943. En 1952, on en n’était plus là mais les femmes étaient encore démunies ; elles cherchaient des solutions. En rentrant de Beyrouth, Hélène retrouva Nine qui avait trouvé une adresse, rue de l’Ouest. Ça lui coûterait 25.000 F. Nine passa ensuite au journal pour demander 20.000 F à François. A son tour, celui-ci s’empressa d’aller demander une telle somme à Jean qui accepta. La veille le journal titrait :

La miraculée du Charleville-Paris

tente de fournir aux enquêteurs un portrait de l’assassin

            Geneviève était excitée par ce nouveau fait divers comme autrefois par l’affaire Mary Lampson. Elle était surtout pressée que Jean lui rende les 20.000 F. François se rendit chez Nine. Ils échangèrent un baiser.

10. Un jour mais pas maintenant.

Hélène et Nine se rendirent ensemble rue de l’Ouest avec l’argent mais la femme recherchée n’habitait plus là. « On peut essayer nous-mêmes » dit Nine. Elle proposait un lavement avec de l’eau oxygénée borique. Hélène revint le soir. Elle ressentit une douleur vive au moment de l’injection. Les deux femmes parlèrent le temps que le produit fasse son effet. Au matin, Hélène quitta l’appartement de Nine.

11. Il avait besoin de revenir en arrière.

L’assassinat quatre ans plus tôt de Mary Lampson avait tout pour passionner l’opinion publique. Depuis le dessaisissement du juge Lenoir, l’affaire végétait ; de nombreuses irrégularités avaient entaché l’enquête. Pour François, l’environnement de la victime avait été insuffisamment explorée. Il était bien décidé à creuser cette piste. Il avait rencontré Maître Archimbaud, l’avocat des parents de la victime.

Affaire Mary Lampson

« La justice doit rouvrir le dossier ! »

estime l’avocat de la famille de la jeune actrice sauvagement assassinée il y a bientôt quatre ans.

François s’accrochait à la lettre manuscrite retrouvée dans le sac de la victime. Le mari avait juré qu’il ignorait tout. François se tourna vers Oscar Drouhet, l’archiviste du journal. François voulait ausculter la vie de Mary Lampson et … celle d’Henri Keller.

12. Il n’a pas l’air de se passer grand-chose…

A son arrivée, Hélène fut accueillie par Lambert, le correspondant local du journal. Pendant son voyage vers Châteauneuf, ses démangeaisons étaient devenues des brûlures. Lambert remarqua qu’elle n’allait pas bien. Mais Hélène voulu aller d’abord à Chevrigny. Pour l’édition du soir, il faudrait déposer le papier et les photos le matin à la gare de Châteauneuf au train de 7h20. Lambert voulait s’arrêter au Café de la Place, Hélène demanda de pousser jusqu’au barrage de 80 m de haut et 240 m de large qui se dressait-là comme un mur. Elle prit des photos. Ils revinrent vers le village et virent la chapelle Saint-Thibault restaurée par un aristocrate. On construisait un nouveau village Chevrigny-le-Haut. Pour certains, la construction du barrage avait été une aubaine. Les Duhourcin avaient acheté un hôtel du côté de Nice. Hélène et Lambert entrèrent dans le café. On annonçait la mise en eau à la fin du mois. C’est l’ingénieur qui devait prendre la décision. Pendant qu’Hélène se rendit aux toilettes, un homme entra : il demanda à Campois s’il avait suffisamment de chaises pour la réunion du lendemain.

13. Il vous reste bien un petit quelque chose.

En sortant du café, l’ingénieur ralluma sa pipe et se rendit au « Bureau d’informations du barrage de Chevrigny » marqué par des insultes et des traces de chevrotine. Il avait tenu à loger sur place, l’Hôtel de la Serre ayant fermé deux ans auparavant. L’ingénieur entra dans le local. Hélène voulut l’interviewer. « Je vous appellerai quand ce sera le moment » répondit Destouches. Il n’y avait rien à manger chez Campois ce qui n’empêcha pas le patron de trouver une part de hachis parmentier pour l’ingénieur quand il revint. Puis un homme fit son entrée : Gaston Buzier, le patron de la scierie. Son père avait été le maire de la ville pendant trente-cinq ans ; lui n’avait jamais réussi à se faire élire. Il s’était autoproclamé chef de file des opposants. Il semblait vouloir en découdre avec Destouches. Mais celui-ci n’entra pas dans son jeu. Il sortit et rejoignit son local pour se coucher sur sa natte de paille de riz. On l’avait prévenu que la mission serait difficile.

14. Tant qu’on les surveille.

Gisèle et Lucienne s’étaient toujours détestées à l’école communale. Voilà que les hasards de la vie les réunissait à nouveau puisqu’elles avaient été recrutées toutes les deux pour travailler chez Dixie. Guénot avait obligé Lucienne à aller à l’entrepôt de Montreuil, très loin de chez elle. Le magasin n’était pas encore ouvert. Une quinzaine d’ouvrières avaient été embauchées pour un mois. Seules les meilleures resteraient pour être vendeuses. Elles étaient payées à 75% du salaire minimum ; les horaires étaient extensibles, beaucoup de choses étaient interdites et les heures de pause défalquées du salaire. Il s’agissait de composer des assortiments de layette bon marché, ce qui désespérait Geneviève préoccupée de la rentabilité. Guénot avait tenu à recruter des ouvrières non syndiquées, célibataires ou jeunes mariées ou des femmes plus âgées avec des enfants plus grands. Jean était passé au magasin avec Geneviève et Gisèle avait été marqué par le manque de confiance du patron. Guénot, au contraire, reprenait du poil de la bête et Jean craignait qu’il ne veuille prendre sa revanche. Geneviève voulait le faire surveiller par un expert-comptable. Finalement, tout le monde surveillait tout le monde.

15. Je mentirais en disant le contraire.

Hélène se rendit à la pharmacie pour ses brûlures à la jambe puis prit un taxi pour descendre à Chevrigny. Pour le chauffeur, le barrage était une aubaine, il apportait du travail. Elle frappa à la porte de la mairie. Un homme, Antoine Cristin, lui ouvrit. Il cumulait les fonctions de secrétaire-adjoint et de postier. Le facteur avait quitté le village un mois plus tôt et le maire Jean Ramuel avait démissionné. La ville était administrée par la préfecture. Le village attendait maintenant la disparition administrative du village et la mise en eau. Cristin serait nommé à la mairie de Châteauneuf, la ville voisine. Le village était divisé entre ceux qui acceptaient ce sort et ceux qui s’y opposaient.

En sortant de la mairie, Hélène rencontra une femme nommée Raymonde qui lui demanda ce qu’elle comptait écrire. Hélène lâcha : « je suis enceinte » et le regretta aussitôt. L’ingénieur avait passé toute sa matinée à aller voir ceux qui n’avaient pas encore vendu à l’Électricité. Il notait tout dans son carnet. Puis Raymonde rentra chez elle. Lambert arriva peu de temps après. Voyant qu’elle n’était pas bien, il lui parla du Dr Marelle. Elle voulait aller à Chevrigny-le-Haut. La ville tardait à s’édifier faute de volontaires. Hélène ressentit des douleurs.

En attendant la réunion du soir, elle appela la rédaction et tomba sur Denissov. Puis, elle retrouva Lambert Ropiquet d’Orval. Il était d’Orval et avait trois ans de plus qu’Hélène.

16. En Amérique !

Il y avait déjà une cinquantaine de personnes dans la salle. Les gens continuaient à arriver. Hélène vit Raymonde au premier rang et Cristin. Au fond de la salle, un garçon nommé Petit Louis selon Lambert : « Personne ne sait ce qu’il comprend. Pas même lui sans doute ». L’ingénieur Destouches se présenta à l’assemblée et expliqua qu’il était chargé d’organiser le départ de tous les habitants avant la mise en eau du barrage. (191) Soudain, un homme rappela que le Président de la République avait été saisi et que cette démarche était suspensive. Destouches répondit à M. Besson d’Argoulet que cette intervention ne servirait à rien. L’ancien maire intervint à son tour ; il fut immédiatement critiqué pour avoir vendu le village. Buzier refusait de travailler sur le barrage. Puis, ce fut le tour du Dr Marelle auquel Émile Blaise, le boulanger, reprocha d’avoir foutu le camp en vendant son cabinet. Destouches finit par abandonner l’assemblée.

Hélène voulait parler au médecin. Il lui donna rendez-vous pour le lendemain à 11h30. Sur le trottoir, un attroupement s’était formé autour de Petit Louis. Émile Blaise lui demandait où il voulait aller avec l’argent : « En Amérique ! » (197). A ce moment-là, une 4CV s’arrêta : c’était le Père Lacroix, le curé qui avait pris en charge la paroisse depuis la mort du vieux curé. Il avait la fâcheuse habitude d’arriver systématiquement en retard.

17. C’était une nouvelle vie.

La vie de Jean avait été marquée par les déconvenues. Pourtant, l’ouverture du magasin s’annonçait bien sous la férule de M. Georges. Seule inconnue : la clientèle. Mais il avait d’autres soucis. Et il accusait la presse de ses ennuis. Il en voulait à François et regrettait les 20.000 F. Il imaginait que c’était pour un avortement, ce qui pouvait expliquer l’absence de Nine. Et maintenant, François parlait de rouvrir le dossier Mary Lampson. Le juge Mallard était en charge de rouvrir l’instruction. Geneviève approuvait cette démarche. « Elle connaissait pourtant le fin mot de l’histoire ! Tétanisé par le désarroi, Jean lui en avait fait l’aveu à mots couverts le soir même du meurtre ! Depuis, jamais elle n’en avait parlé ouvertement avec jean, c’était un point obscur dans leur relation. Chose étrange, lorsqu’elle avait compris ce qui s’était passé, pour la première fois depuis leur mariage, elle avait montré un semblant d’estime pour son mari. Avec le lavage et la restitution du mouchoir ensanglanté du Charleville-Paris, Jean avait eu l’impression que Geneviève acceptait qu’il tue parfois une jeune femme, comme d’autres, obscurément flattées, supportent avec fatalisme que leur mari soit un peu coureur. « Ils ne sont pas près de l’attraper, le Grand Méchant Loup, hein, mon Bouboule ! » lui avait-elle dit ». (201) Jean se demandait pourquoi cette affaire criminelle électrisait autant son épouse. La famille de Mary Lampson n’était pas la seule à réclamer. Celle d’Antoinette Rouet elle aussi demandait justice.

La miraculée du Charleville-Paris

Alain Poitaud, 22 ans : « Je pense avoir voyagé en compagnie de l’assassin ! »

Jean jeta le journal dans une poubelle du métro. Le poinçonneur s’inquiéta pour lui. Le témoin s’était présenté à la police mais il ne se souvenait pas des traits de l’homme. Jean s’inquiétait : qui s’occuperait de Colette. C’est à ce moment-là qu’il arriva devant l’énorme enseigne de Dixie.

18. Il y avait autre chose.

François ressassait la dernière déclaration d’amour de Nine à son départ. Pourquoi une femme pouvait-elle avoir besoin de 20.000 F et aussi vite ? Il envisageait différentes hypothèses : le remboursement d’un vol, un avortement ? Il voulait fouiller son appartement. Il surveilla l’immeuble, vit un homme monter mais une fenêtre s’alluma deux étages en dessous de l’appartement de Nine. Trois jours plus tard, il reçut un message d’Oscar Drouhet lui demandant de passer le voir. Il avait trouvé quelque chose sur Nine. Aucun historien spécialiste du Moyen- Âge du nom de Keller ne semblait exister. François remonta à la rédaction et se demanda si Nine avait une seconde vie. Il irait voir Florentin pour essayer d’en savoir plus.

19. Qu’est-ce qui s’est passé, dites-moi ?

Palmari était convaincu que les « gros poissons », les avorteurs réguliers, se ferraient de loin. Il fallait avoir de la chance. Outre l’hôpital de Châteauneuf, il avait dans son périmètre d’action ceux de Villeneuve, de Fontaines-sur-Serre et de Bordavent. Il se rendait dans ces services inopinément pour consulter le registre des urgences. Il était sujet aux insomnies, comme son épouse Augustine. La chance, ce matin-là, s’appelait Antoinette Lepron, inscrite dans le registre journalier pour curetage utérin. Palmari interrogea l’interne. Il voulait parler à la jeune femme. Le médecin refusa de lui donner le compte-rendu médical. « Personne ne pourra comptabiliser le nombre d’avortements évités grâce à la crainte que nous générons » dit-il à Cosson en rentrant (211).

20. Si j’ai bien compris, vous en aurez besoin.

Hélène mit beaucoup de temps à écrire son premier article. Denissov lui avait promis la première page.

Mort d’un village français

Chevrigny déchiré entre « résistants » et « négociateurs », sera dans quelques jours recouvert par les eaux.

L’article présentait Chevrigny, village de l’Yonne qui avait compté jusqu’à 3.500 habitants et qui vivait ses dernières heures. Pour les uns, comme Jean Ramuel, il n’y avait plus qu’à partir, les autres, comme Gaston Buzier, voulaient rester à tout prix. Au milieu, il y avait l’ingénieur Destouches. Hélène remit l’enveloppe à l’employé de la gare et choisit de redescendre à Chevrigny. Raymonde sortait de l’épicerie. Hélène commença à parler à Destouches : il la laisserait travailler car il avait besoin d’elle. La presse locale n’avait fait qu’envenimer les choses en prenant parti pour les résistants. Il lui donna rendez-vous pour le lundi suivant. A l’école, il n’y avait plus que onze enfants sous la surveillance de Rosalie Bourdon. Son fils, titulaire d’un CAP d’ajusteur s’était tué sur le chantier en tombant d’une grue. Avec l’argent, elle a installé sa fille à Châteauneuf en lui achetant une boutique de fleuriste.

Hélène arriva chez le Dr Marelle. Dans la salle d’attente, elle reconnut petit Louis qui l’appela « Célène ! » Le Dr Marelle précisa à Hélène que Petit Louis n’était pas là pour la consultation mais pour consulter les revues féminines. Il passait sa vie dans ce cabinet ou à l’église. La visite d’Hélène fut interrompue par l’entrée de Georgette, la femme de ménage. Le Dr Marelle avait repris le cabinet d’un vieux confrère mais comme il comptait prendre sa retraite dans sept ou huit ans, il n’avait pas refait la décoration. Hélène voulut lui parler de son inflammation. Il l’examina : c’était une vaginite. Elle ne voulait pas garder le bébé. Le Dr Marelle ne voulait pas prendre ce risque.

Elle repartit en taxi. En croisant Petit Louis, elle demanda au chauffeur de s’arrêter.

Disparition de Chevrigny

« Mon fils est mort sur le barrage »

dit Rosalie Bourdon, l’institutrice qui s’apprête à fermer l’école du village.

21. C’est le meilleur moment pour ça.

Louis s’était retrouvé à l’arrière d’une moto conduite par Lucien et se dirigeant vers Khaldé, à une quinzaine de kilomètres de Beyrouth. Il avait remporté le quart de finale du Trophée grâce à la blessure au coude qui avait handicapé son adversaire Mansour Trad. L’entraîneur Hamid-le-Champion ne voulait plus s’occuper de Lucien à moins qu’il ne lui verse la moitié de ses gains. ; surtout, il ne digérait pas la défaite de son poulain au premier tour. Lucien se retrouvait seul et épuisé. En visitant un client au nord de la ville, Louis avait vu par hasard Lucien en conversation avec Leela Chakir, une Indienne dont le père avait été le trésorier de la coopérative scolaire quand Louis en était le président. Une idylle avec Leela ne serait certainement pas bien vue par M. Chakir qui avait de plus hautes ambitions pour sa fille.

Les deux hommes arrivèrent chez Jef Lombard dont la maison voisinait un aéroport. Ancien boxeur d’élite devenu entraîneur et masseur (et un peu aveugle) ne se montra guère enthousiaste pour s’occuper de Lucien jusqu’à ce qu’il apprît le nom de son précédent entraîneur, Hamid Mokkadem. Lombard avait été le challenger malheureux de Mokkadem dans ce championnat du Liban et on avait prétendu que le match avait été truqué.

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